mardi 6 décembre 2016

L'Étrange cas de Juliette M., de Megan Shepherd,

Juliette est la fille d’un célèbre physicien décédé qui a scandalisé la communauté scientifique avec ses expériences. Elle vit depuis comme domestique à l’université et tente de survivre dans l’atmosphère sombre et dangereuse de la ville. Elle tombe par hasard sur son ami d’enfance, Montgomery, qui lui révèle une nouvelle bouleversante… son père ne serait peut-être pas mort ?!
Quatrième de couverture par Milan, Macadam.
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Une auteure disait que la section livre pour enfants regorgeait de merveilles tandis que pour les YA (young adult, pour les non-intimes), il faut parfois creuser pour tomber sur des perles…
J’avoue être plutôt d’accord bien que ce soit une affaire de goûts, mais je m’intéresse peu à la littérature YA qui possède des caractéristiques qui ne me parlent pas : les archétypes entre l’héroïne badass-badass ("je me bats comme un guerrier mais j’ai le physique d’une princesse Disney, faut pas déconner") et le prétendant so-d4rk ("je suis brun, je suis très pâle, je me moque de toi sans arrêt pour mieux attirer ton attention parce que genre ça marche vraiment comme ça"), les quêtes et les sujets très personnels qui pourraient être intéressants mais se résument à peu de choses et se concluent facilement ("tu es l’éluuu ! Tu as juste à croire en tes amis et ça marchera, frère."), des plumes bien souvent plus axées dans les dialogues/pensées que les alentours (en même temps, les livres jeunesse feraient tous 800 pages au lieu de 300 après…), un contexte historique installé mais en même temps bourré d’anachronismes qui facilitent souvent la trame et passent inaperçus quand on veut bien fermer les yeux dessus…
Bref, pas du tout le genre d’ingrédient qui me met en appétit. J’en achète donc très rarement et si un titre me plaît, je regarde d’abord s’il se trouve en bibliothèque (et si je suis conquise comme pour La Passe-Miroir, qui est une perle, je le rachète avec amour, et sa suite dans la foulée).


L’Étrange cas de Juliette M. m’avait fait de l’œil mais sans plus : la couverture est très sympathique (ah, un ingrédient YA qui me plaît !), le résumé accroche, mais le fait que le roman se déroule dans les années 1890 me refroidissait : en effet, on a beau être à Londres en 1890 et même si Juliette Moreau est déchue de son rang social, elle tutoie comme la première des tavernières. À l’instar de beaucoup de livres jeunesses historiques, l’époque n’est pas franchement bien retranscrite, mais bon. Je m’y attendais, donc pas de grosse déception à ce niveau.
Par contre, je m’attendais à de l’horreur et l’horreur était au rendez-vous. Assez timidiement, mais c’est que L’Étrange cas de Juliette M. possède une ambiance réellement glauque. On cause vivisection, folie héréditaire, expériences peu orthodoxes… Megan Shepherd mérite son petit warning pour son livre qui n’est pas à mettre entre toutes les mains.
(Autant je ne comprends pas le "interdit aux moins de 13 ans" des tomes de l’Épouvanteur, autant L’Étrange cas de Juliette M. peut porter cet avertissement)
Et que serait une ambiance bien construite sans une jolie plume ? Les métaphores sont bien choisies et la narration est fluide, ça aide pour installer le lecteur dans une jungle hostile et aux environs douteux.

Enfin, si la narration est fluide, il y a beaucoup de moments où le lecteur se heurte à des révélations avortées, de fausses tentatives et c’est très frustrant. J’étais presque tentée de lire la fin du livre pour avoir quelques clés tant on patauge bien trop longtemps...
Enfin, pour avoir une clé en particulier : l’issue de ce triangle amoureux dont on se serait bien passés.
J’ai horreur des triangles amoureux : il y a une chance sur deux pour s’attacher au mauvais gars, déjà, et celui de L’Étrange cas de Juliette M. est d’un cliché assommant. Sur la gauche, on a Montgomery, le serviteur et homme à tout-faire, blond, doux et tendre et sur la droite, Edward, noble rebelle, brun ténébreux et mystérieux, un peu rustre. Bon, la seule pointe d’originalité, c’est que Montgomery est plus à l’aise dans un salon de thé et Edward, dans une jungle.
Mais enfin…
J’avais cherché la réponse sur des chroniques sans trouver, donc pour vous, futur/e lecteur/trice, l’amour de la vie de Juliette Moreau se révèle être [spoiler] Montgomery, donc ne vous attachez pas à l’autre, ce n’est pas la peine [/fin du spoiler].


Un autre détail me dérangeait pour cette romance et pourra déranger d’autres : Juliette est incapable de choisir. Mais au lieu de se contenter de faire le point sur elle-même, elle draguouille les deux, embrasse l’un et a honte quand l’autre surprend son geste. Ma fille, tu sais comment j’appelle ces nanas ? Des salôôôôôôôôpes Des allumeuses. Donc au lieu de donner de faux espoirs, pose ton postérieur sur une chaise et songe que les hommes sont des êtres doués de sentiments et qu’on ne les goûte pas comme on le ferait avec deux gâteaux.
C’était ma minute leçon amoureuse, mais j’avais besoin de râler contre ça. J’ai une allergie concernant les gens indécis surtout en matière de sentiments et qui agissent de façon irréfléchie.
Hormis ce gros défaut, le personnage de Juliette est dans l’ensemble agréable : forte mais avec un fond torturé, intelligente mais gauche socialement. Elle n’est pas adorable, mais elle est sympathique !

Grosso modo, L’Étrange cas de Juliette M. est un bon p’tit bouquin. Enfin, le mérite ne semble pas tout à fait mérité puisque paraît-il que c’est presque un copier/coller de L’Île du Docteur Moreau de H. G. Wells. N’ayant pas lu ce roman, je ne peux pas dire à quel point Megan Shepherd a copié ou s’est inspirée de la base, ce que je sais, c’est qu’elle ne cache pas sa source d’inspiration.
Mais je pense affirmer qu’au moins, H. G. Wells n’est pas venu casser les bonbons de ses lecteurs avec un triangle amoureux sans charme.

Par contre, dernier petit détail : beaucoup de lecteurs se sont plaints que L’Étrange Cas de Juliette M. soit en fait une trilogie, considérant qu’un seul tome suffisait et que ce premier n’avait pas besoin de suite.
Sauf que le un me fait clairement l’impression d’un cliffhanger… Heureusement, la suite m’attend à la bibliothèque, car malgré les fausses notes repérées, je lirai la suite de cette saga.

Grâce à la couverture, je peux valider l’idée 84 du Challenge des 170 Idées :

             Quelques anecdotes sur ce bouquin,
• Megan Shepherd ne cache pas s’être largement inspirée du roman L’Île du docteur Moreau de H. G. Wells publié en 1896.

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