vendredi 31 mars 2017

La Mouche, suivi de Temps Mort, de George Langelaan,

« À la mémoire des futures victimes de la relativité. » Pour le lecteur du recueil, la dédicace de « Temps mort » résonne comme une menace et les mésaventures d’Yvon Darnier comme un avertissement. Victime d’une expérience scientifique mal maîtrisée, ce dernier est projeté dans un monde où le temps paraît suspendu et la vie arrêtée. Le sort de Robert Browning dans « La Mouche » n’est pas moins tragique quand, à l’issue de sa tentative de téléportation ratée, il découvre avec effroi qu’il n’a plus tout à fait apparence humaine.
Voici deux histoires terrifiantes, deux chefs-d’œuvre du genre dans lesquels la science nous ouvre les portes d’une réalité étrange et saisissante.
Quatrième de couverture par GF Flammarion.
---

Peu de gens connaissent George Langelaan, pourtant, il est l’auteur d’une nouvelle qui a donné le chef d’œuvre de David Cronenberg La Mouche (pitié, connaissez au moins cette perle du cinéma d’horreur-science-fiction, c’est un de mes films favoris).
J’adore la littérature horrifique, dans le fantastique, la peur cohabite avec la fascination pour ce qui est surnaturel et ces créatures qui déguisent beaucoup de peurs humaines et bien réelles finalement. La science-fiction (ou de son nom savant et contradictoire : le réalisme fantastique), rien n’est déguisé en revanche : c’est cash, même. La peur est plus percutante et il y a toujours cette supposition derrière "avec la science qui avance aujourd’hui, ça pourrait presque arriver". Et justement, ces deux nouvelles sont des cris contre les mauvais usages de la science. 
Et elles font mouche (admirez mon humour, allez, elle est gratuite).
D’ailleurs, George Langelaan dédie la premier nouvelle, La Mouche, à Jean Rostand : GF Flammarion laisse une note complète : « [Jean Rostand] fut un fervent défenseur de la vulgarisation scientifique et mit en garde ses contemporains contre les possibles dangers de la science laissée aux mains d’apprentis sorciers. » P. 33
La couleur est annoncée.

Cette première nouvelle, toutefois, est plus émouvante que réellement effrayante : le fait de connaître l’histoire dans ses grandes lignes a supplanté les effets de surprise… Mais tout de même ! La version de Cronenberg est très différente de cette de George Langelaan et connaître le film n’empêche pas la lecture. Beaucoup d’éléments changent et certains rebondissements viennent frapper.
George Langelaan s’essaie à l’enquête policière de plus, bien que forcément, avec un sujet de science-fiction, la résolution de l’énigme ne sera pas évidente, même si des doutes persistent. Maintenant, est-ce que ce mystère est terrifiant ? Est-ce que la réponse s’avère plus terrifiante encore ? Pas vraiment : j’ai surtout été émue par l’histoire de Robert Browning et de sa femme (qui est bien brave, au passage). C’est même dommage que La Mouche ne soit qu’une nouvelle : il y a une vraie matière à étendre en roman en jouant sur les relations (le narrateur est le frère de Robert Browning et tout porte à croire au début que sa belle-sœur a tué son frère).
Un très bon récit, mais qu’il faut compléter avec La Mouche de Cronenberg : bien plus effroyable et glauque, la dimension "corps malade en évolution" est mis plus en avant (et est plus intéressant).
Je ferme toujours les yeux quand Brundle-Mouche se nourrit, surtout avec cette méthode de consommation.

L’évolution de Brundle, très différente de celle de Robert Browning.
Je préfère Brundle ceci dit, le côté "scientifique timide" est l’origine du geek 
et Jeff Goldblum possède un certain charme.

Pour être honnête, j’ai préféré en fait Temps Mort, la seconde nouvelle : plus longue, elle joue vraiment avec les nerfs du lecteur et George Langelaan nous laisse dans un mystère total, au même titre que son protagoniste Yvon Darnier.
Suite à une expérience du docteur Pierre Martinaud, le militaire Yvon Darnier se réveille dans le laboratoire. Tout semble normal mais les personnes autour sont figées : les corps sont chauds mais aucune respiration, aucun battement de cœur, aucun mouvement… Et ce n’est pas seulement dans le laboratoire, même dans Paris : les horloges sont stoppées, les animaux sont immobiles également, jusqu’au soleil qui a arrêté sa course. Yvon Darnier est seul et il doit comprendre ce qu’il se passe.

« […], tel un nouveau Robinson Crusoé égaré dans le cœur de Paris, capable de voir et de toucher des millions de gens et pourtant complètement seul au monde, sans même un perroquet ou une chèvre, peut-être même sans un seul microbe pour m’aider à tomber malade et à mourir. »
P. 105

Le lecteur nage en plein brouillard et même s’il suit le protagoniste, le sentiment de solitude est contagieux.
J’avoue, cette nouvelle est glaçante et j’étais assez scotchée : tant à cause de l’ambiance que de la conclusion. Ce qui ne retire rien à l’émotion que j’ai ressenti à la fin de ma lecture. En plus, le mystère est maintenu jusqu’au bout et c’est d’autant plus savoureux car il est très ingénieux. 
Une excellente histoire.

C’est même dommage que les autres œuvres de George Langelaan soient si difficiles à trouver car ce recueil presque un coup de cœur et je serais ravie de relire sa plume.
J’ai eu du mal à dormir après tant le malaise était fort durant la lecture, mais pari réussi : j’ai lu de la science-fiction. De la science-fiction terrifiante.
Et par chance, depuis, j’ai dormi.

Grâce à la couverture, je peux valider l’idée n°132 du Challenge des 170 Idées (si, si, regardez bien : la bouteille de spray est à droite) :

             Quelques anecdotes sur ce bouquin,
• Espion anglais (bien que né en France) mais également journaliste et bien sûr auteur, George Langelaan était bilingue et a écrit la majorité de sa bibliographie en français. La Mouche avait été écrit en français mais aussi en anglais et a été publié la première fois dans la revue Playboy en 1957 sous le titre de The Fly.

lundi 20 mars 2017

Lais, de Marie de France,

Contes d’aventures et d’amour, les Lais, composés à la fin du XIIème siècle par une mystérieuse Marie, sont d’abord, comme le revendique leur auteur, des contes populaires situés dans une Bretagne ancienne et mythique. Les fées y viennent à la rencontre du mortel dont elles sont éprises ; un chevalier peut se révéler loup-garou ou revêtir l’apparence d’un oiseau pour volet jusqu’à la fenêtre de sa bien-aimée.
Mais la thématique universelle du folklore est ici intégrée à un univers poétique à nul autre pareil, qui intériorise le merveilleux des contes de fées pour en faire l’émanation de l’amour.
Quatrième de couverture par Le Livre de Poche.
---


Si vous aimez la Bretagne et le Moyen-âge, vous devez impérativement lire ce recueil de vieilles légendes de ces contrées celtes : le style médiéval peut rebuter, mais les histoires sont courtes, simples et bien souvent pleines de charme.

Et puisque nous fêtons aujourd’hui le printemps :
The Progress of Spring (1905), par Charles Daniel Ward

             Guigemar (Guigemar),
Le recueil ouvre le bal musical avec un conte très classique qui ne surprendra pas les lecteurs des légendes médiévales : un chevalier trop téméraire chassera une biche enchantée et, en la blessant, la flèche se retournera contre lui, ne pouvant être retirée que par une femme amoureuse. Après la malédiction, il y a l’amour entre le chevalier et la male-mariée qui se déclareront leurs sentiments sans pouvoir les afficher : le chevalier aura une chemise nouée que seule son aimée pourra défaire, tandis qu’elle portera une ceinture que seul son amour pourra défaire.
Bref, le quotidien de nos ancêtres du XIIème siècle, ils ne s’embêtaient pas avec les statuts Facebook, hé.
Rien de très claquant mais Guigemar met dans le bain.

             Equitan (Equitan),
J’ai déjà plus apprécié Equitan : le côté un peu moral n’est pas à prendre au sérieux avec une fin franchement burlesque. Si l’infidélité ne pose pas de problème dans Guigemar, dans Equitan, la méchanceté ajoutée fait qu’il y a une punition qui plane au-dessus des coupables.
Un humour certain dans ce lai qui se rapproche des contes burlesques de l’époque.
(Et il met dans le bain aussi. Vous voyez mon humour ?)

             Le Frêne (Le Fraisne),
Une histoire originale car Marie de France aborde le thème des jumeaux (une particularité de naissance qui posait problème au Moyen-âge) qui est peu utilisé dans les légendes médiévales.
Le récit est plutôt touchant avec l’aventure de cette jeune Frêne (oui, je parle de la demoiselle, là) et ce milieu religieux.

             Bisclavret (Bisclavret),
Loup-garou oblige, j’ai été emportée par Bisclavret ! D’autant plus surprenant que le loup-garou n’est pas le méchant de l’histoire, au contraire : c’est le personnage principal qui sera trahi par sa femme. À la base, en tant que créature maudite et effrayante, le loup-garou a le mauvais rôle, ici, il est au contraire soutenu.
Chose que je n’aurais jamais imaginé pour un récit médiéval !
Un lai que j’adore.


             Lanval (Lanval),
Héhé, le lai qui s’inscrit dans les légendes arthuriennes. Lanval est un récit que je suis même surprise de n’avoir jamais vu dans Kaamelott : un chevalier que tout le monde oublie sans cesse, y a de quoi faire de bons sketchs !
Autrement, Lanval n’a rien à envier à ses collègues Lancelot ou Yvain : son récit est intéressant et le côté féerique est bien plus appuyé que dans les autres légendes qui versent vraiment dans la merveille surprenante.

             Les Deux Amants (Les Dous Amanz),
Lai assez curieux, Les Deux Amants a un côté burlesque et ne possède aucun sérieux : la fin est même presque ridicule ! Comme une blague avec une chute (sans jeux de mots).
Vraiment pas le lai le plus marquant mais il fait sourire.

             Yonec (Yonec),
Un lai avec un air de légende : poème assez long, toute l’histoire est détaillée et bien construite. Yonec s’inscrit parfaitement dans les récits du Moyen-âge.
Métamorphoses, male-mariée, amour caché… il y a tout, même la demoiselle qui s’évanouit une paire de fois en quelques heures !
Un bon récit.

             Le Rossignol (Aüstic),
Malgré mon amour pour Bisclavret, Le Rossignol est certainement mon lai préféré : il est plein de poésie, tout en pudeur. Il s’écarte des merveilles et du surnaturel et serait presque un conte réel, rajoutant à l’émotion que Le Rossignol me laisse.
Si vous n’avez pas le courage de lire le recueil entier, lisez au moins Le Rossignol.


             Milon (Milun),
On retourne ici à un lai classique qui s’inscrit comme une énième légende médiévale. L’histoire est sympathique mais rien de très marquant, surtout après Bisclavret et Le Rossignol qui sortent clairement de l’ordinaire : passer après mes deux coups de cœur, c’est difficile.

             Le Malheureux (Chaitivel),
Tout d’abord commune, cette histoire offre en fait une conclusion en double teinte très intéressante : Le Malheureux peut aussi s’appeler Les Quatre Deuils et ces deux titres offrent un approfondissement intéressant.
Un lai très sympa.

             Le Chèvrefeuille (Chievrefueil),
J’ai eu un souci avec ce lai car il est très connecté au récit de Tristan et Yseult, récit que je n’ai pas encore lu. J’étais donc perdue, je ne comprenais pas grand-chose (ce serait comme lire le tome trois du Trône de Fer avant de lire le premier).
Donc je ne peux pas vraiment me prononcer : je relirai Le Chèvrefeuille une fois que j’aurai lu Tristan et Yseult.

             Eliduc (Eliduc),
Comme pour le premier lai qui met dans le bain, le dernier s’inscrit dans la lignée et clôture ce recueil avec cette aventure classique, histoire d’achever les impressions "légendes médiévales". Malheureusement, Eliduc n’a rien de très original et ne sort pas du lot.

Je termine donc ma lecture avec un avis mitigé : j’adore les légendes médiévales, j’ai eu de vrais coups de cœur pour certaines, autrement, d’autres sont nettement plus communes et s’effaceront assez vites de ma mémoire. Mais je ne regrette absolument pas ma lecture !

Grâce à deux lais, je peux rattacher ce livre au Challenge des Légendes Arthuriennes !

             Quelques anecdotes sur ce bouquin,
• Concrètement, Mairie de France "n’a rien inventé" : elle a surtout immortalisé des légendes connues en Bretagne. C’est ce qu’elle précise dans l’introduction.

jeudi 16 mars 2017

Anna Karénine, de Léon Tolstoï,

En gare de Moscou, deux jeunes gens s’aiment au premier regard. Femme d’un haut fonctionnaire, ornement de la société tsariste de son de son temps, Anna Karénine éblouit le frivole comte Wronsky, par sa grâce, son élégance et sa gaieté. À ce bonheur, à cette passion réciproque porteuse de scandale et de destruction, ils ne résistent pas longtemps.
En écho à cette tragédie programmée, on entend toute l’âme d’un peuple et les premiers craquements de l’Empire russe en train de se lézarder. L’inoubliable Anna Karénine, c’est l’apogée du génie littéraire de l’auteur de Guerre et Paix.
Quatrième de couverture par Pocket.
---

« Elle venait d’entendre des mots que redoutait sa raison, mais que souhaitait son cœur. »
P. 157

Après Crime et Châtiment de Dostoïevski, il fallait bien que je parte à la rencontre de Tolstoï et son roman adapté un bon nombre de fois : Anna Karénine.
Même si c’est un des romans les plus connus de la littérature russe, je me suis toujours efforcée de ne jamais m’intéresser à l’histoire pour découvrir totalement le récit : je connaissais juste l’essentiel, c’est à propos d’une femme infidèle.

Tout d’abord, j’ai trouvé le genre de Tolstoï bien plus accessible que celui de Dostoïevski ! Moins torturé, moins monologué, Tolstoï enchaîne plus facilement les événements. J’ai trouvé toutefois qu’il manquait un peu de poésie, mais la faute en revient peut-être à la traduction assez simple (les annotations sont rares, tandis que dans Crime et Châtiment, toutes les onomastiques et jeux de mots étaient expliqués).
Cela ne retire rien à l’intérêt du récit toutefois : on suit deux histoires, deux romances, celle qui unit Anna et Alexis Wronsky et celle qui unit Lévine et Kitty.
(Oui, certaines éditions écrivent Vronski, dans la mienne, c’est Wronsky)
Alors certes, la plume de Tolstoï ne se concentre pas sur les décors russes et les jolies métaphores mais il arrive tout de même à instaurer une ambiance et préfère laisser de la place pour l’essentiel : les relations. C’est le ciment de ce roman.


Les personnages et leurs liens sont parfaitement mis en forme, le tout est réaliste dans cette culture russe : car certes, le décor n’est pas mis en avant, mais Tolstoï pose les questions qui tourmentent son époque (cette éternelle rivalité entre l’Europe et la Russie, jugée vieillie, le dur passage vers la modernité, les nouvelles visions religieuses…), faisant d’Anna Karénine un roman bien russe.
Mais ce sont surtout les personnages qui vont trancher pour l’avis final : si ni les Karénine, ni Lévine, ni Kitty ne fascinent, si leur histoire ne captive pas, Anna Karénine sera un long ennui de 980 pages. Pour ma part, je n’ai pas été très transportée par la romance qui lie Anna Karénine et Wronsky, car j’ai nettement préféré celle de Lévine et Kitty (couple avec une différence d’âge, alors forcément, je craque) : cette seconde romance est criante de réalisme, elle n’est pas toute rose mais il y a beaucoup de notes d’espoir. Typiquement ce que j’aime.
Pour en revenir à la première, j’ai été surprise de voir que l’infidélité arrive si vite (on est loin de Madame Bovary où Emma passe par les phases d’hésitation et de flirt). Tolstoï ne s’attarde pas sur les parades amoureuses : Anna tombe vite dans les bras de Wronsky et les doutes viendront plus tard, s’amplifiant. C’est ce point qui a été dérangeant : je sais qu’Anna est un personnage audacieux pour l’époque, moderne, mais sur la fin, elle est tout aussi hystérique qu’Emma Bovary et perd de son charme. D’autant plus que j’étais plus attendrie par le pauvre Alexis Karénine, malgré les défauts avancés, j’ai eu de la peine pour cet homme.

Au final, c’est un très bon roman, plus facile à lire que ce que j’avais cru (des lectures de début de semestre ont ralenti mon rythme, autrement, je l’aurai fini il y a un bon moment), totalement accessible pour les lecteurs d’aujourd’hui. Finalement, ce n’est pas le genre qui posera problème, il faudra s’intéresser aux personnages pour que ce grand classique soit un succès.
Quoiqu’il en soit, ça me met en confiante pour Guerre et Paix !... Mais je le lirai dans un bon moment.


             Quelques anecdotes sur ce bouquin,
• Léon Tolstoï a été inspiré par l’histoire de la maîtresse de son voisin. Mais vous raconter le fait-divers serait spoiler le roman complet.

mercredi 8 mars 2017

Héros ou Couple inoubliables [18],

              

Organisé par Cassie56, le rendez-vous hebdomadaire Héros ou Couple Inoubliables permet de laisser une trace, un article à propos d’un personnage héroïque ou d’une romance qui vous a marqué, ému ou ravi en répondant à trois questions.
Aucun jour n’est fixé, mais j’ai opté les mercredis pour mon blog.






    → Pourquoi ce couple ?
Parce qu’il est rock’n’roll, parce que c’était mon premier Sire Cédric et que, bien que difficile sur les sujets amoureux, Kristel et David ont réussi à me charmer.
    → Est-ce le couple principal ?
David n’est pas vraiment le personnage principal, mais c’est le couple qui est le plus en avant en tout cas, c’est sûr.
    → Quel aspect particulier de la relation vous a tant plu ?
Le côté rock’n’roll : cela fait un moment que j’ai lu ce roman mais je me souviens que David était plus classique tandis que Kristel sort plus de l’ordinaire, elle est atypique avec cette chevelure bleue. Et pourtant, leur relation est harmonieuse et on sent des sentiments sincères.
Et puis il y a un moment particulier qui m’avait beaucoup émue. Mais je ne peux pas en dire plus, à côté du résumé de Pocket, je garde le secret d’un rebondissement important… [spoiler] car si Kristel décède dès les premiers chapitres, victime de ce démon aux allures d’enfant, cela ne l’empêche pas d’être présente, voire d’aider David et apporter son soutien. [/fin du spoiler] Sa présence apporte une lumière dans cette ambiance glauque.
Un couple touchant. Mais bon, pour le coup, j’avoue, c’est que je suis surtout tombée sous le charme simple de Kristel !

mardi 7 mars 2017

Black Mirror II,

Jeune étudiant américain à la vie parfaitement normale, Darren vient d’être embauché dans un magasin de photo. Sa vie prend pourtant un tour dramatique lorsqu’une jolie jeune femme prénommée Angelina entre dans la boutique. Très vite, les drames s’accumulent pour Darren : sa mère est victime d’un accident, il découvre que son patron cache un lourd secret et Angelina disparaît.
Pris dans ce terrible engrenage, Darren décide de mener sa propre enquête. Son investigation le mène très rapidement vers la ville anglaise de Willow Creek, rendue tristement célèbre par une série de meurtres atroces douze ans plus tôt…
Quatrième de couverture par Micro Application.
---

Black Mirror II est le jeu pour lequel j’ai écrit ma toute première critique de jeu-vidéo : mais j’ai évolué et je pense que mon style s’est amélioré (je ne pouvais pas vraiment faire pire sauf en le faisant exprès), adorant ce jeu, il fallait bien que je lui accorde un digne article !
Pour les curieux, je laisse l’article à disposition : j’avais choisi de belles images, tout de même.


Il faut savoir que j’ai commencé à jouer à Black Mirror II pour m’aérer l’esprit un été : je venais de déménager (la vente s’était mal passée car le dossier avait été perdu deux fois), j’avais peur de perdre contact avec mes amis et j’allais plonger, un mois plus tard, dans l’étrange monde de la fac. Pour couronner le tout, j’avais rapporté une saloperie de bactérie d’un voyage.
Je m’en souviendrai de cet été 2010 : j’étais complètement amorphe et je me suis rappelée que je possédais la suite du premier jeu, Black Mirror, que j’avais tant aimé. Et dès les premières minutes du jeu, j’ai été transportée.


Le début est pourtant assez déconcertant : au revoir villages rustiques, manoirs gothiques et météo anglaise et hello ! bord de plage américain, jeune étudiant cynique, cris de mouette lointains et diner coloré. On fait la rencontre de Darren Michaels qui a la parole acérée et un humour bien personnel, ce qui change beaucoup du précédent protagoniste, Samuel Gordon, plus guindé, sérieux et renfermé.
Alors spin-off ou suite ?
Déjà, ce changement de ton donne un nouveau souffle à Black Mirror : plus dynamique, plus vivant, le jeu est plus animé. Enfin bon, ça reste un point’n’click classique, rien de très folichon !


Ce qui fait la force de ces jeux, c’est leurs énigmes et leur ambiance, et comme pour son prédécesseur, Black Mirror II a tout bon pour ces deux points.
Les énigmes sont variées : puzzles, indices à dénicher, combines, mémorisation, logique… Et ce ne sont pas de simples puzzles sur un seul et même écran : le jeu vous pousse à explorer, à tester, à chercher. Souvent, les point’n’click se contentent d’énigmes en un seul plan (lettre déchirée à rassembler, code à rentrer…), Black Mirror II propose de vrais casse-têtes.


Pour l’ambiance, même si le début change de son prédécesseur, on retrouve vite le cadre où s’est déroulée l’enquête de Samuel. Ça provoque même un contraste durant la partie, une vraie chute. Il n’est pas obligatoire de jouer au premier Black Mirror, mais c’est vivement conseillé : le lien existe et c’est émouvant de revisiter Willow Creek. D’autant plus que le château Black Mirror est inaccessible en tant qu’étranger et qu’on se languit de pouvoir enfin parcourir lieux à nouveau !
Les musiques sont par contre d’un tout autre style : elles sont assez inégales mais elles ont eu la chance de se trouver sur un CD audio, contrairement aux musiques précédentes, malheureusement, car celles-ci sont quasiment introuvables… (même en téléchargement dans les recoins les plus sombres, oui, oui, j’ai cherché)

Les suites ne sont habituellement pas très bonnes, voire inutiles : ce n’est pas le cas de ce second opus. Ça change du premier titre, mais c’est tant mieux ! Il n’y a pas de copié-collé et l’histoire proposée tient la route.

Bref, Cranberry Production a tout bon avec ce Black Mirror II et, avec un tel cliffhanger, ça donne envie de découvrir le dernier jeu de cette superbe trilogie.


             Quelques anecdotes sur ce jeu,
• Suite un peu éloignée de Black Mirror, il est quand même conseillé d’avoir joué au premier : l’émotion de retourner dans ce décor et de reconnaître des personnages qui ont bien changé en 12 ans, c’est un peu comme retrouver de vieux amis d’enfance. Et bien sûr, pour la compréhension de l’histoire. Cela dit, ce n’est pas tout à fait indispensable. À savoir quand même qu’un coffret qui réunit toute la trilogie est disponible en France.
• Selon certaines sources, de nombreuses scènes (surtout vers la fin qui est nettement plus glauque que le début) ont été inspirées par les films de Dario Argento. Et bien d’autres encore. Par exemple, Darren cite entre autres un de ses films préférés, Les Baleines du mois d’Août, car certains décors s’en rapprochent. Un petit clin d’œil de la part des développeurs, donc.
• Vous débloquez des bonus en prenant en photo certains éléments (toujours prendre en photo avant d’examiner). Par exemple, le bonus grosse-tête pour changer la taille de la tête, ce qui donne un côté comique :

vendredi 3 mars 2017

Victor Hugo vient de mourir, de Judith Perrignon,

« La nouvelle court les rues, les pas de porte et les métiers, on entend l’autre dire qu’il est mort le poète. Vient alors cette étrange collision des mots et de la vie, qui produit du silence puis des gestes ralentis au travail. L’homme qui leur a tendu un miroir n’est plus là. Tout s’amplifie, tout s’accélère. On dirait qu’en mourant, qu’en glissant vers l’abîme, il creuse un grand trou et y aspire son temps, sa ville… »
La mort de Victor Hugo puis les funérailles d’État qui s’annoncent déclenchent une véritable bataille. Paris est pris de fièvre.
D’un événement historique naît une fable moderne, un texte intime et épique où tout est vrai, tout est roman.
Quatrième de couverture par L’Iconoclaste.
---


Aperçu sur des blogs que je juge de référence comme Joyeux Drille et Les Livres de Céline, Victor Hugo vient de mourir m’intéressait beaucoup pour son sujet : les étudiants en lettres n’ignorent pas (ou dans ce cas, vous êtes de mauvais étudiants qui n’écoutent pas en cours !) que Victor Hugo est le premier auteur à avoir eu des funérailles nationales et d’une telle ampleur. Faut dire que le bonhomme n’était pas qu’un p’tit scribouillard qui passait ses soirées au bar et qu’il a même fini ses jours comme un respectable papy qui a changé la face de la France.
Si je connais un peu la fin de la vie de l’auteur des Misérables, j’avoue que je pensais être plus experte en la matière et ma déception vient du fait que Victor Hugo vient de mourir m’a complétement perdue.

Il y a une forte ambiance politique : à force de s’asseoir sur les bancs de la gauche, ceux de la droite et prendre part aux changements gouvernementaux, il va de soi que le roman aborde les questions politiques et sociales, mais finalement, je me suis sentie larguée dans ce monde où les idéaux s’affrontent.
Le livre pourrait apprendre sur le sujet mais les explications sont trop rares et je n’ai même pas pu fermer le livre tant j’en ouvrais d’autres et pages d’internet pour comprendre ce que je lisais. Ou alors je voulais trop comprendre et j’aurais dû me laisser porter…
Ou je m’attendais plus à lire quelque chose sur Victor Hugo plutôt que l’état de la France à partir du 22 mai 1885 ?


Je l’emprunterai peut-être de nouveau à la médiathèque si j’ai la volonté de le retenter, en potassant par contre mon sujet avant, car Victor Hugo vient de mourir n’est pas un roman à mettre entre des mains de novice.
Vous êtes prévenus.

             Quelques anecdotes sur ce bouquin,
• L’auteure, Judith Perrignon, compte beaucoup de biographies atypiques dans ses œuvres : C’était mon frère (2006) est à propos du peintre Vincent van Gogh et son frère Théo. L’intranquille : Autoportrait d’un fils, d’un peintre, d’un fou (2009), co-écrit avec le peintre Gérard Garouste qui est dépeint dans ce livre. N’oubliez pas que je joue (2012) co-écrit avec Sonia Rykiel, couturière qui est également le sujet du livre. Et j’en passe, bien sûr !

jeudi 2 mars 2017

Le Mystère de la Chambre Jaune, de Gatson Leroux,

« Eh bien, mon cher Sainclair… vous avez lu ?...
— Le crime du Glandier ?
— Oui ; la « Chambre Jaune » ! Qu’est-ce que vous en pensez ?
— Dame, je pense que c’est le « diable » ou la « Bête du Bon Dieu » qui a commis le crime. » 
Malgré l’ironie, Sainclair n’est pas loin d’exprimer l’opinion générale ! Mlle Stangerson vient d’échapper à la mort, mais son assassin court toujours. Comment s’enfuit-on de la Chambre Jaune ? Par la porte ? fermée à clé ! La fenêtre ? elle est grillagée ! Ni cheminée, ni autre issue… Aussi close qu’un coffre-fort. Un vrai mystère…
Le génial Rouletabille est déterminé à résoudre ce casse-tête. Comment ? Mais par « le bon bout de la raison », pardi ! 
Rondement mené, Le Mystère de la Chambre Jaune est devenu un classique du genre policier.
Quatrième de couverture par J’ai Lu.
---


Après Sherlock Holmes, le chevalier Charles Auguste Dupin, Hercule Poirot… je passe maintenant à l’icône Joseph Rouletabille ! Un registre bien différent du Fantôme de l’Opéra, Gaston Leroux présente ici une enquête plus classique, digne des prédécesseurs qui l’ont inspiré.

Bon. Si j’adore Sherlock Holmes, si j’adore Hercule Poirot, Joseph Rouletabille n’a pas (encore) réussi à me séduire. Mais on ne désespère pas : le reporter apparaît dans d’autres enquêtes, je tenterai de lire la suite pour voir si je peux trouver le personnage plus attachant.
Ce n’est pas tant la faute du personnage, dans le fond : Le Mystère de la Chambre Jaune est un roman trop long pour l’enquête proposée. Des pages auraient pu disparaître (contrairement au Fantôme de l’Opéra où il n’y a que peu de longueurs), certains passages auraient pu être raccourcis… Même si les énigmes sont nombreuses, l’enquête est finalement rapide à expliquer, et bien qu’intéressante, c’est une enquête qui aurait pu être racontée plus brièvement.
Ces moments où ça piétine (enfin, ou plutôt le narrateur Sainclair piétine, car Rouletabille a les idées claires) ont ralenti ma lecture.

Pour continuer sur un autre point négatif, c’est qu’il y a vraiment un système de "phrase à trous" : on a quelques mots, quelques passages, faut combler le reste. Beaucoup d’enquêtes fonctionnent de cette façon, mais je trouve que Gaston Leroux amène mal ses indices et les réflexions ne sont pas toujours limpides. Dans Le Mystère de la Chambre Jaune, on peut réfléchir à des hypothèses, mais concrètement, c’est de se laisser porter dans le mystère et laisser Rouletabille gérer.

Après, le roman est bon : on sent que la trame est réfléchie et l’enquête est intéressante, digne du Double Meurtres dans la Rue Morgue de Poe (son personnage Dupin est régulièrement pris en référence dans le roman de Leroux) et il y a une ambiance tout aussi claustrophobe. Sans spoiler, il y a une grande part émouvante derrière ce mystère et si je n’ai pas trouvé Rouletabille très attachant, les victimes emportées dans cette énigme le sont.
De plus, le rythme est maintenu : les derniers chapitres filent à toute allure et complètent totalement l’énigme. Car j’aime les policiers qui parlent du procès, puisque cette conclusion fait partie du dénouement. Anne Perry devrait en prendre de la graine pour ses romans qui se terminent sur le nom du tueur (sans exagéré, ses romans se terminent de cette façon).

En somme, une enquête intelligente avec quelques acteurs touchants mais Le Mystère de la Chambre Jaune est un roman que je juge un peu bancal : on sent que le genre policier est encore en train d’émerger. Mais le défi est relevé et la prouesse reste admirable !


             Quelques anecdotes sur ce bouquin,
• Il y a de nombreuses références à Edgar Poe et sa célèbre nouvelle Double assassinat dans la rue Morgue. Et Arthur Conan Doyle n’est pas oublié puisque Sherlock Holmes est également cité.
• Lui-même reporter, Gaston Leroux s’est intéressé à des affaires judiciaires. Loin d’être le petit scribouillard neutre, il a même lutté contre la peine de mort.


mercredi 1 mars 2017

Héros ou Couple inoubliables [17],

              

Organisé par Cassie56, le rendez-vous hebdomadaire Héros ou Couple Inoubliables permet de laisser une trace, un article à propos d’un personnage héroïque ou d’une romance qui vous a marqué, ému ou ravi en répondant à trois questions.
Aucun jour n’est fixé, mais j’ai opté les mercredis pour mon blog.





    → Pourquoi ce personne ?
Car j’ai eu un vrai coup de cœur pour cette demoiselle la première fois que j’ai joué à Silent Hill 3.
    → Est-ce le personnage principal ?
Sans se tromper : oui, [spoiler] c’est même le personnage principal de Silent Hill puisqu’elle est Alessa. [/spoiler]
    → Quel aspect particulier du personnage vous a tant plu ?
Quand on réunit tous les personnages de la saga, ce sont des hommes adultes totalement désillusionnés, déprimés… Certains sont même carrément insipides, incolores, inodores comme Henry dans Silent Hill 4. Et dans cette galerie, Heather détonne : c’est l’adolescente, la pointe d’originalité, le vent de fraîcheur du groupe et c’est toujours un plaisir de suivre (ou resuivre) l’histoire de cette tête brûlée.
On est loin de la Mary Sue qui est vindicative et n’a peur de rien ceci dit, bien au contraire : Heather s’effraie, se sermonne pour reprendre courage, a des répliques cinglantes, cyniques. Elle est vive, elle est expressive et de par ces qualités, Heather pimente le jeu et briserait presque le quatrième mur tant ses réactions sont parlantes au joueur.
Si elle fait rire, elle émeut également car Heather est un personnage qui possède de nombreux secrets qui seront à découvrir au fil du jeu.
Bref, un personnage génial, de plus, c’est bien la seule héroïne à balancer un coup de pied rageur sur le cadavre du boss final.

« Je n’ai pas franchement envie de manger et boire quelque chose d’une réalité alternative, ok ? »