mercredi 20 août 2014

Un, Deux, Trois, d'Agatha Christie,

On a beau s’appeler Hercule Poirot, on se sent bien peu de chose, renversé dans le fauteuil du dentiste, prêt pour le supplice. L’illustre détective est beaucoup plus à son aise en face d’une affaire criminelle embrouillée.
Qu’à cela ne tienne ! Cette séance humiliante va donner à Poirot l’occasion de montrer son extraordinaire talent.
Quatrième de couverture par Le Livre de Poche.
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« La désinvolture de l’assimilation provoqua chez Poirot une irritation passagère. Mr Morley était un bon dentiste, d’accord, mais il y avait d’autres bons dentistes à Londres. Tandis qu’il n’existait qu’un seul Hercule Poirot. »
P. 17

Un, deux, trois… est déjà la sixième enquête d’Hercule Poirot que je lis et je ne m’en lasse toujours pas : détective excentrique avec son accent francophone (qu’on imagine sans peine), son obsession de la symétrie et de l’ordre, ses légendaires moustaches et son égocentrisme qui n’a d’égal que son ingéniosité. Et pourtant, malgré tous ses défauts fatigants, cet ancien policier m’amuse énormément car ce personnage est un excellent filon pour savourer l’humour de sa maman, l’astucieuse Agatha Christie.
Et justement, ce tome-ci est sûrement un des plus truffés de cynisme britannique !

Différentes versions de couverture.

Déjà, dans Un, deux, trois…, le narrateur n’est ni le capitaine Arthur Hastings, ni une victime mais Hercule Poirot lui-même. Ou plutôt, de façon indirecte car le personnage subit tant d’affronts dans cette enquête qu’il en aurait tait plus d’un s’il avait été le narrateur direct.
En plus de faire chauffer ses méninges, Agatha Christie nous offre ce que j’avais toujours reprocher à Arthur Conan Doyle : une proximité avec son personnage pourtant très secret, lui donnant une dimension plus humaine, plus réaliste, car ici, nous avons affaire avec un Hercule Poirot insulté, méprisé, ému, ridiculisé, soucieux, berné et victorieux. Sans compter que l’inspecteur Japp vient pimenter un peu le tout.
On passe de sa peur à se rendre chez le dentiste, à son mépris pour un suspect qui pourrait être en fait innocent, la nostalgie de sa rencontre avec la Comtesse Vera Rossakov et tant d’autres facettes du détective qui est pourtant pingre quant à sa vie privée.

 http://erebus-odora.deviantart.com/art/Sleuth-260138065
«  « Se pourrait-il que je vieillisse ? » se demanda Hercule Poirot, stupéfait d’une pensée aussi incongrue. »
P. 129

En revanche, j’ai moins apprécié l’enquête qui touche des points que j’aime moins dans le rayon policier. Disons que je digère toujours mal le monde de l’espionnage, sauf quand George Smiley est de la partie. J’ai trouvé l’histoire alambiquée et j’ai eu du mal à me retrouver avec tous ces filons. D’ailleurs, exceptionnellement, je n’ai pas fait de plan : le nom et liens de certains personnages relèveraient du spoiler et sachant qu’on découvre des suspects tout au long de l’histoire…
Si par contre ce n’est pas mon enquête préférée, je n’oublierai pas le coupable de si tôt que j’ai beaucoup apprécié ! Mais chut, vous comprendrez peut-être pourquoi en lisant ce roman…
Pour ne pas vous mettre sur la voie, j’éviterai de dire quels personnages j’ai porté dans mon cœur, il y en a toutefois un que je ne peux pas ignorer : le dernier que rencontre Poirot avant de rentrer chez lui, celui qui fait une révélations particulièrement amusante et en même temps touchante.

Un, deux, trois… est donc un livre que seuls les Poirotois pourraient pleinement apprécier : l’enquête est originale et est fidèle à l’esprit de Christie mais peut-être un chouilla confus, la force de ce tome se trouve, selon moi, dans l’humour des personnages (les conversations entre Japp et Poirot, quoi ♥), la galerie de personnages riches en couleurs et des énigmes, mises à part, ingénieuses.

J’en profite pour relier cette chronique à l’idée 40 du Challenge des 170 Idées, je ne vais pas retomber sur une brosse à dents de si tôt, donc j’en profite !
http://lectures-de-vampire-aigri.blogspot.fr/2013/11/challenge-04-le-challenge-de-170-idees.html

             Quelques anecdotes sur ce bouquin,
• Le titre original, One, Two, Buckle my Shoe vient d’une célèbre comptine anglaise datant de 1805. Mais Agatha Christie a été plus loin : chaque vers sert de titre de chapitre, rappelant même la structure de l’enquête sous forme de métaphores par moments !

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